
SEPTEMBRE 2001
Sur ces tours qui chancelèrent
Chancellent nos certitudes
Le monde ne sera plus demain
Ce qu’il était d’habitude
Le siècle nouveau commence
Et il nous a vite étonnés
Une guerre d’un nouveau genre
Menace nos destinées
Et cette fois l’adversaire
A changé la règle du jeu
Il suit ses propres règles
Au mépris des lois de la guerre
Ni front ni champ de bataille
A quoi bon y laisser des morts
L’ennemi est bien trop fort
Pour se battre à sa manière
Bien sûr sur son terrain
Nul ne peut l’affronter
Mais là où la force est vaine
La ruse peut l’emporter
Une forme de stratégie
Cynique et bien calculée
Au lieu de mille morts hasardés
Une seule vie sacrifiée
Si l’on divise par mille
Toutes les dépenses à faire
On peut même très pauvre
S’offrir une guerre et la gagner
Juste injuste
Est-ce à cette aune
Qu’on peut en juger
Nul dans ce monde
N’est assez pur
Pour le décider
Certains disent que l’Amérique
Ne l’avait pas volé
Mais qui mérite innocent
D’être assassiné
Bien sûr l’Occident
N’a pas de quoi se vanter
Mais l’Islam à son apogée
N’a-t-il rien à se reprocher
Tous les empires passés
Qu’on admire et qu’on vénère
La Grèce Rome Babylone
Se sont-ils mieux comportés
Toutefois on doit admettre
Que dans les pays pillés
Par notre âpre cupidité
On rêve de se venger
C’est la loi du marché
Qui traite ainsi les hommes
Des hommes peuvent la défier
Par la mort délibérée
On ne doit pas se cacher
Ni leur haine ni nos torts
Ni le risque qu’ils empirent
L’un par l’autre aggravés
Là comme les choses se passent
On ne voit pas le danger
Pas sûr que nous ayons la chance
D’être longtemps préservés
Il y a des armes terribles
Qui peuvent nous anéantir
C’est disait-on pour faire peur
Et non pas pour s’en servir
Une logique jusqu’alors
Respectée parce que réciproque
Mais pour qui n’a rien à sauver
Où est le risque d’en user
Ce siècle sera terrible
Tant de griefs accumulés
Au cas où l’ennemi succombe
Un autre viendra le relayer
Jusqu’au jour où à bout de forces
Purgés de leurs sales fièvres
Les deux parties s’accorderont
La grâce de survivre
On pourrait le faire tout de suite
Pour prévenir cette misère
Mais je connais trop les hommes
Ils veulent avant verser le sang
Toi qui m’écoutes ou me parles
Tu vivras ces temps maudits
Ou tu mourras c’est selon
Ta bonne ou mauvaise fortune
Les dieux déments sont parmi nous
Ils ont pour nom tous ceux
Qui veulent détruire le monde
Ou le recommencer
Vous croyez peut-être des dieux
Vaincre l’absurde colère
Vous n’êtes à leurs yeux blasés
Que cendres et poussière
Le monde n’est pas à refaire
Il n’est pas à corriger
L’homme est coulé dans la boue
Du limon qui l’a formé
Et c’est à ras de terre
Qu’il doit vivre sa destinée
Il n’a ni ailes ni auréole
Qui puisse le transformer
Rendons à la raison
Sa place légitime
Donnons à la raison
Le pas sur les passions
Qu’aillent au diable ces apôtres
Prêtres tribuns ou gourous
Ils versent dans l’esprit des hommes
Un vin âcre qui les rend fous
Libre à ceux dont la foi l’exige
D’aller au temple de leur choix
Mais que le siège de la loi
Ne soit pas où ils vont prier
Albert Pesses
