Espace de je


C’est un terrain, parfois désert, parfois meublé de rêves, mais toujours vague, parfois recouvert par la mer, roulant des vagues à l’âme et des lames de fonds qui les défont...


C’est tout à la fois tout et rien, terre à terre et aérien, c’est un milieu aquatique, un centre de la terre, un vide de vie qu’on peuple de chimères, où l’on passe aux aveux sans sérum et sans questions...


Un souffle de vent, et des formes difformes se forment, un frémissement, et des femmes diaphanes se fanent...


On peut voir quelquefois des êtres apparaître, des groupes, des troupes, des armées, des monceaux de vies, des tranches d’humanité, et puis quelqu’un tire la petite chaîne, la bonde se lève, et la foule s’écoule et disparaît dans un vide de noir néant...


C’est un espace béant, une ouverture, un passage passable et peu sûr à travers tous les murs, les murailles pour pénétrer les entrailles...


C’est une voie pour la trouver, un espace improbable où l’on se cherche, où l’on se trouve, où l’on se perd, où l’on s’aperçoit qu’on ne sait plus s’y reconnaître...


C’est un lieu, c’est ici, c’est à des lieues, des kilomètres, c’est pour toujours, ou pour cinq minutes, c’est partout, c’est nulle part, je ne sais pas où c’est, et pourtant j’y vais, j’y suis,


et je vous écris de là-bas...



Eric Rémy